Le-Scaphandrier

Le-Scaphandrier

Un Thriller écolo-subaquatique

"Il Faut couler la Belle Hélène ! »

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À Toulouse dans les bureaux de la « Clean sea water »

-         Voilà, c’est fait ! J’ai placé l’annonce : « Cherche assistant pour convoyer péniche « La Belle Hélène », diplôme de scaphandrier exigé » venait de lancer, au téléphone, le sinistre Franco Pistachi. Il s’adressait ainsi à son patron, le PDG du groupe.

-         Bien Franco, répond t-il réjouit, pourquoi un assistant plongeur certifié ?

-         C’est une assistante que j’ai recrutée, à peine l’annonce parue dans l’un de leur magazine écolo. Je me fais fort de faire passer notre délicate manœuvre comme un véritable exploit de notre part auprès de cette jeune écervelée. Je vous donne son pedigree… Voilà Ernestine Troubarède née le 13 novembre 1986, à Sanary dans le Var, donc majeur ! Un diplôme de Scaphandrier, classe deux B, délivré par l’ENS.

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Je la ferai, plonger lors de la navigation de notre péniche, la Belle Hélène, sur le canal du midi. Ce, à chaque fois qu’un objet tombera  à l’eau, du genre ferraille. Et totalement non polluant. En arrivant en mer, je la ferai boire un soir au cours du repas de fin de parcours, un peu de GHB dans le champagne. Elle ne saura pas ce qui s’est passé pendant la nuit. Au matin, notre chargement de fûts vidés au large pendant la nuit sera toujours en place, rempli alors de sable et d’eau et livré à notre usine de retraitement… Où nous n’aurons pas beaucoup de dépenses. Et la demoiselle sera ainsi satisfaite.

-         D’accord Franco, vous avez carte blanche. Mais je ne suis pas au courant.

-         Enfin patron vous me connaissez !

-         Justement ! Je connais votre passé de proxénète notoire, inscrit sur un casier judiciaire qui m’a coûté fort cher pour lui rendre sa virginité. Alors, méritez vos émoluments. Moi, je ne vous connais plus. Je n’ai pas envie de me voir licencié par le Conseil d’administration alors que l’on parle en haut lieu de la suppression des parachutes dorés.

Tout était donc bien prévu de la part de ces tristes individus.

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Sauf qu’un soir, dans le Var :

-         Winston Churchill a dit à son cabinet de guerre en 1940 « Coulez le Bismarck ! » Moi, Justin Corniflouille, Président  du Club de plongée « Écolo Sub », je vous le dis ce soir « Il faut couler la belle Hélène ! »

Cette apostrophe véhémente venait d’être lancée lors de la réunion du club par Justin dit « Ju, un gaillard solide, décidé ainsi que les membres de son association à défendre les fonds marins trop souvent pollués par des escrocs irresponsables. Ils étaient là, quatre hommes et deux jolies filles, autour d’une table dans le local du club, au-dessus du restaurant le « Provençal » à Sanary, haut lieu de rencontres des plongeurs et de scaphandriers locaux. Eux, ils étaient la fine fleur, l’élite, les intégristes, en fait de hardis défenseurs de l’environnement subaquatique. Et leur président, lui, prêt à aller jusqu’au bout de ses idées :

-          Quand même Ju, c’est peut-être trop important cette fois-ci, interroge Titin Corniflouille son cousin et habituel second. Couler cette péniche maudite ce n’est pas comme poser des câbles et banderoles en travers du canal à chacun de ses passages. En avons-nous les moyens matériels !

-         Mes amis, cette fois-ci, nous allons frapper très fort l’opinion publique !. Renseignés Titin ? Oui  ! Outillés, nous avons ce qu’il faut.

Nous savons depuis un moment que la Clean Sea Water fait exécuter ses basses besognes par le nommé Franco Pistachi. J’ai réussi à savoir qu’il n’est pas blanc bleu ! Connu des services de polices comme escroc, proxénète, faussaire de cartes bancaires, chèques volés, un vrai palmarès !

-         Mais comment peux-tu affirmer cela ? La Clean est connue !

-         Un cousin de ma femme, qui travaille aux RG, s’est procuré son ancienne fiche. Parce que attention, l’actuelle est vierge. Son passé aurait été effacé. Avec, bien sûr, la recommandation financière nécessaire.

-         Ce n’est pas possible s’exclament-ils tous. Mais comment es-tu au courant pour le prochain transport, les dates, le parcours, le cousin ?

-         Non, cette fois-ci répond Justin, j’ai fait mieux. Ce Pistachi de malheur, il continue à fréquenter en basse ville, à Toulon, le milieu interlope et fessier. J’ai réussi à lui mettre dans les bras, si j’ose m’exprimer ainsi, Mado la Lyonnaise. Justement une amie du cousin de ma femme qui lui sert d’indicateur. Un soir, elle l’a entendu téléphoner à son directeur. Je sais tout ! Il a même embauché une plongeuse formée à l’ENS !

Cris dans la salle :

-         Qui c’est cette cagole ?  Trahir ainsi ce qui reste de la mer !

Sourire de Justin qui reprend, ménageant ses effets :

-         Justement, là nous avons notre cheval de Troie, cette plongeuse est parmi nous dit-il en s’adressant d’un regard complice à l’une des deux filles présentes. La plus gaillarde, la plus belle, « Tine » pour ses amis.

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Les hurlements reprennent :

-         Traîtresse ! Nous faire ça, à nous, qui t’avons payé le stage de l’ENS !

Justin demande le silence et l’obtient :

-         Calmez-vous ! Voilà le plan, écoutez-moi bien. Tine est embauchée par ce Pistachi. Comme elle l’a entendu, il faut redorer le blason écologique de cette entreprise qui en a bien besoin. Car les transports par leur péniche « La belle Hélène » entre Toulouse et Fos commencent à faire jaser. Des pêcheurs à la ligne les auraient vus balancer les rejets hospitaliers mis en fûts, dans le canal. C’est pour cela que Tine est la plongeuse de sauvetage. Elle va, d’après ce qui est prévu, intervenir quelques fois, en présence de la presse, j’en suis sûr. Mais pas à la fin sur la cargaison complète. Le voyou a prévu de lui faire absorber du GHB, la drogue des violeurs, pour éviter qu’elle ne se rappelle ce qui va se passer la nuit quand ils vont jeter le chargement par-dessus bord en eau profonde, en arrivant en mer. À ce moment, il y a quand même un petit problème. Explique-nous Tine.

-         Petit problème, comme tu y vas Ju ! Cette drogue, comme tu dis, c’est celle des violeurs ! Il y a que moi, je ne veux pas être violé par ce marquamaou ! En plus, sans m’en rendre compte ! Non, je refuse de passer à la casserole même pour le club ! Voilà, maintenant s’il y en a un qui veut prendre ma place, qu’il ne se gêne surtout pas !

Un lourd silence s’abat sur le groupe des écolos guerriers pendant un moment et Titin pour détendre l’atmosphère lance :

-         Tine, tu ne vas pas nous faire un estampéou quand même ! On sait bien que c’est toi qui vas tout décider. Mais quand même, ce ne sera pas si pénible, puisque tu ne sentiras rien.

Là, Ernestine se fâche tout rouge :

-         Bande de tronchemolles ! Darnagas ! Et si en plus cette sale tronche il me fait le pitchoun ? Qui sont ceux qui vont m’aider à l’élever ?

Le silence revient devant ce problème. Justin, chef responsable décide :

-         Nous allons signer un engagement. Voilà, si Tine se retrouve dans cette situation alarmante, nous nous engageons tous par écrit, ce soir même, à reconnaître l’enfant né de ces dégâts collatéraux.

Tous approuvent sauf Titin qui murmure dans son coin :

-         Je ne vois pas pourquoi moi, je serai, comme qui dirait, un collatéral alors que la belle Tine, je n’en aurai pas profité !

Ses amis, voyant qu’il va être possible de continuer la réalisation du plan d’attaque, le font taire. Justin reprend donc :

-         Passons au moyen matériel. J’ai réussi à retrouver une mine sous-marine italienne de la dernière guerre, qui va bien nous être utile. Elle était utilisée par leurs nageurs de combat, qui coulaient des navires anglais à Gibraltar.  Je l’ai fait démonter par un plongeur-démineur de mes amis et recharger avec de l’explosif neuf et moderne. Elle est prête à l’emploi.

-         Oui, reprends Titin, toujours aussi peu convaincu, comment tu vas la faire péter ? Elle a certainement un système de retardement, alors qui va la mettre en place ? comment on va calculer le délai de mis à feu ?

Justin commence à s’énerver :

-         Écoute Augustin, tu es vrai roumpi-balli ! Toi si tu avais été St Thomas, au moment de marcher sur l’eau Jésus, il aurait été obligé de te dire de bien mettre les pieds sur les pierres. Bon,  je vais vous expliquer le fonctionnement de cette mine. Je vous ai apporté le plan. Regardez c’est un cylindre avec un aimant puissant pour fixer sur la coque en fer de la péniche. Je continue, à l’avant là ! Il y a une petite hélice, c’est cela le retardateur ! Quand la mine, elle est fixée, dès que le bateau navigue, l’hélice, elle se met à tourner ! et cela déclenche l’explosion à partir du nombre de tours d’hélice, prévus sur le cadran à chiffres que vous voyez sur l’arrière. Chiffres dont le nombre de tours correspondent à la distance à parcourir. Tine au cours de sa dernière plongée de sauvetage, elle va connaître la distance qui reste à faire. Alors, elle réglera la mine avant de la poser pour que l’explosion se produise à l’endroit de l’immersion frauduleuse des fûts en mer. D’où, appel au secours, arrivée du canot de sauvetage, des pompiers, sans oublier la gendarmerie maritime. Là ! Découverte du délit grave de la Clean ! Nous y serons aussi, pour faire le bruit qu’il faut ! Surtout pour convoquer la presse et les médias. Résultat, le patron de la Clean et le Pistachi, le soir, ils coucheront en prison. Et « La belle Hélène », elle sera au fond de la mer !

Rassurés, se sentant tous, investis d’une mission sacrée, les éco-comploteurs quittèrent les lieux décidés à mener leur action punitive à son terme.

Ernestine embarqua à la date et l’heure prévue à Toulouse sur la Belle Hélène. Elle effectua, quelques plongées lors de la navigation sur le canal, à chaque fois, que le Franco Pistachi se débrouillait pour faire tomber à l’eau des cadres de bicyclettes rouillées qu’il avait fait embarquer en pontée. Seule, une fois, voulant soit disant aider Tine à enfiler son vêtement néoprène, il se permit une privauté vers les fesses rebondies de la belle. Il se fit coller sur la joue gauche un pastisson sonore et une réflexion qui ne l’était pas moins de sa part :

-         Ce n’était pas prévu dans le contrat ! Alors, je te la rends ta main baladeuse !

Il se le tint pour dit, se promettant de profiter plus tard de la situation.

La belle scaphandrière tenait Justin au courant, l’appelant tous les soirs. Elle lui fit donc savoir que ce jour-là, elle profiterait de la présence de la presse convoquée lors du dernier sauvetage pour se mettre à l’eau devant les journalistes présents. Elle devait en profiter pour mettre la bombe en place sous la coque de la péniche. Pour la distance, qui restait à parcourir, elle allait régler l’engin en conséquence. Cette délicate opération fut menée à bien.

Justin et son équipe, en attente, à bord d’un zodiac attendaient fiévreusement sur la rive. Ne voyant rien se produire, tous lui posaient des questions angoissantes :

-         Ju, cela ne marche pas. Il a dû endormir Tine ? Ou il a trouvé l’engin !

Lui, imperturbable en vrai chef de guerre, attendait, quand soudain l’explosion retentit faisant s’envoler une bande de goélands qui nageait autour de la Belle Hélène. Cette dernière prit très vite de la bande et s’engloutit dans les flots dans la demi-heure qui suivit. L’ouverture de la brèche dans la coque était justement calculée, ce qui permit à tout l’équipage d’être sauvé. Augustine, elle n’avait qu’à embarquer sur le Zodiac de ses amis qui venait d’arriver sur les lieux, faisant un vacarme tonitruant à l’aide cornes de brume embarquées à cet effet.

Tombant dans les bras vaillants de ses amis, elle les rassura :

-         Ce n’est pas cette fois que je serai fille-mère ! Le Pistachi, il faisait le papillon hier soir au cours du repas de fin de croisière. Un vrai tavan ! Alors, il n’a pas vu que j’avais changé mon verre contre le sien. C’est vous dire que ce matin, il est bien ensuqué. Tout juste, si on a réussi à le mettre dans le canot de sauvetage qui vient d’arriver.

Sur le lieu du forfait, là où la belle Hélène n’aurait jamais dû se trouver, les Gendarmes Maritimes aidés par des plongeurs constataient le délit, découvrant au fond les fûts dangereux largués à la mer.

Pistachi débarquait les menottes aux mains dénonçant vivement son patron, le directeur de la Clean Water, comme étant le principal commanditaire.

Malgré ce cas de flagrant délit, ce dernier s’en tira avec un non-lieu, néanmoins viré de son poste luxueux, remplacé vivement par un autre technocrate averti !

Six mois plus tard une péniche de la Clean Water, « La Belle Alphonsine » naviguait, à son tour, sur le Canal du Midi. Sans plongeur à bord !

Les Plantiers en Cévennes

Juillet 2016

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02/03/2017
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